article

Electrification de la mobilité longue-distance

Enedis, VINCI Autoroutes, Total Energies et six constructeurs européens (Iveco, MAN Truck & Bus France, Mercedes-Benz Trucks, Renault Trucks, Scania et Volvo Trucks) publient un rapport qui analyse les besoins et enjeux de l’électrification du transport routier de marchandises longue distance et plus particulièrement de la recharge en itinérance sur les principaux axes routiers français.

Enedis, VINCI Autoroutes, Total Energies et six constructeurs européens (Iveco, MAN Truck & Bus France, Mercedes-Benz Trucks, Renault Trucks, Scania et Volvo Trucks) publient un rapport qui analyse les besoins et enjeux de l’électrification du transport routier de marchandises longue distance et plus particulièrement de la recharge en itinérance sur les principaux axes routiers français.

L'électrification du transport routier de marchandises longue distance en France: un défi majeur pour la décarbonation des transports

Le transport routier de marchandises représente un enjeu majeur en France, puisqu'il assure 90% des flux de marchandises et génère 7% des émissions de gaz à effet de serre du pays. Face à l'urgence climatique, l'électrification de ce secteur apparait comme une solution prometteuse pour réduire son empreinte environnementale.

Afin d'évaluer les besoins et les enjeux de cette transition, une étude a été réalisée par Enedis, TotalEnergies, VINCI Autoroutes et six constructeurs européens. Elle conclut que l'électrification du transport routier de marchandises longue distance est un défi majeur mais réalisable, à condition de mettre en place des infrastructures de recharge adaptées et de mobiliser l'ensemble des acteurs de la filière.

Des besoins en infrastructures de recharge importants

L'étude estime qu'il faudra installer 12 200 points de recharge sur 519 aires de services et de repos sur les autoroutes françaises d'ici 2035. Parmi ces points de recharge, 10 000 seront destinés aux pauses longues durées et 2 200 aux pauses courtes avec recharge rapide. La consommation d'énergie liée à la recharge des poids lourds pourrait atteindre 3,5 TWh/an, ce qui nécessite d'adapter le réseau électrique avec un investissement de 630 millions d'euros.

Des défis fonciers à relever

Le déploiement des bornes de recharge soulève également des défis fonciers, car il réduira le nombre de places de parking disponibles pour les poids lourds. En effet, si en 2035, seulement 12,5% des poids lourds longue distance seront électriques, il faudra tout de même équiper au moins la moitié des places de parking poids lourds sur un quart des tronçons routiers.

Il est temps d'agir

Des recommandations pour une transition réussie

Pour relever ces défis et réussir la transition vers un transport routier de marchandises plus durable, l'étude propose plusieurs recommandations: Instaurer une planification et une feuille de route partagée pour le déploiement des infrastructures de recharge, en cohérence avec les réglementations futures ; mettre en place des dispositifs réglementaires, administratifs et financiers incitatifs pour anticiper les demandes de travaux, accélérer les démarches administratives et optimiser les investissements ; encourager l'investissement privé dans les poids lourds électriques et les infrastructures de recharge en proposant des mesures incitatives simples et cohérentes avec une visibilité sur le long terme.

Retrouvez l'étude ici

Qu'en pensent les membres de l'Alliance pour la décarbonation de la route ?

Le regard de l'Organisation des Transporteurs Routiers Européens (OTRE):

Nous saluons l’étude réalisée par Enedis, TotalEnergies et Vinci Autoroutes. Déployer des stations de recharge ultrarapide et de grandes dimensions sur autoroute prend plusieurs années du fait des procédures administratives et des délais de raccordement. Concernant l’itinérance des véhicules lourds et contrairement aux véhicules légers, rien n’a encore débuté.

L’étude Enedis, TotalEnergies et VINCI Autoroutes de mars 2024 estime les investissements nécessaires sur le réseau électrique à 630 millions d’euros d’ici à 2035. Cette estimation est hors investissement pour les stations de recharge et l’aménagement des aires. Très clairement, nous comprenons que le développement de la recharge lourde en itinérance nécessitera dans certains cas un aménagement des aires, donc un travail sur le foncier.

Nous soulignons que le temps des décisions sur la mise en œuvre d’un plan ambitieux de développement de la recharge en itinérance des véhicules lourds est arrivé. En ce sens, l’étude conjointe ENEDIS, Vinci Autoroutes et Total Energie fixe le cap mais il est important de comprendre que, contrairement à ce que certains peuvent exprimer, le développement des bornes en dépôts (dont le développement actuel reste à l’état embryonnaire) n'est pas la seule solution pour accélérer la vente des véhicules lourds électriques et atteindre les objectifs de ventes des véhicules électriques fixés dans la SNBC. Nous sommes convaincus que l’élément déclencheur fort sera à n’en pas douter le développement des bornes en itinérance.

Deux questions posées à Giovanni Mattarolo, Chef de projet Mobilité électrique chez Enedis

Alliance : Pourquoi réaliser et publier cette étude maintenant ? La recharge des poids-lourds en France et en Europe manquait-elle d’indicateurs ? De feuille de route ?

Giovanni Mattarolo : Il y a deux ans, au moment du lancement de ces travaux, aucune étude ne permettait d'estimer, de manière détaillée, les besoins de recharge en itinérance pour les poids lourds longue distance sur le territoire français, ainsi que les besoins associés en termes d'infrastructure sur le réseau électrique et routier. Un groupe de travail piloté par Enedis, TotalEnergies et VINCI Autoroute et impliquant six constructeurs poids lourds européens a donc été créé avec comme double objectif : d'apporter, pour la première fois, une vision à horizon 2035 de ces besoins à l’ensemble des acteurs de la filière (pouvoirs publics, gestionnaires de réseau routier, opérateurs de recharge, opérateurs d’infrastructures routières, transporteurs et logisticiens, constructeurs poids-lourds) et d'identifier les enjeux à relever pour être au rendez-vous. D'autres travaux conduits par Enedis sont en cours pour estimer les besoins d'infrastructures de recharge et l'impact sur le réseau liés à la recharge en dépôt et à destination dans les centres logistiques. L'objectif est de continuer à alimenter les acteurs du secteur, pour construire une vision globale et cohérente, partagée, et bien prévoir et anticiper ces besoins de recharge de façon à ce que le réseau soit prêt à les accueillir le moment venu.

Quels sont les résultats-clefs de cette étude ? Au regard d'Enedis, quelles transformations impliquent-ils ?

Pour le réseau électrique, les résultats clés à retenir sont les suivants :

  • Les besoins d'énergie et puissance pour la recharge en itinérance des poids lourds sont significatifs, mais tout à fait intégrables dans le réseau
  • Les travaux d’adaptation du réseau électrique identifiés par cette étude ne présentent pas de difficultés techniques particulières. Ils peuvent cependant dans certains cas bien identifiés prendre plusieurs années (jusqu’à cinq ans pour un poste source, voire plus de sept ans pour la réalisation d’une ligne haute tension B (HTB)). Pour répondre à temps aux demandes des opérateurs de recharge, il est donc crucial de définir des procédures règlementaires, administratives et financières qui permettent la planification et la réalisation à temps des travaux et investissements nécessaires.
  • Il y a une forte complémentarité entre les besoins de recharge en itinérance des véhicules légers et des poids lourds : le raccordement mutualisé des IRVE pour les poids lourds et les véhicules électriques constitue un levier clé dans l’optimisation des travaux et des coûts sur le réseau électrique, collectivement et pour chacun des futurs opérateurs d’IRVE.

Plannifier et préparer l'infrastructure

Louis Dupasquier, Directeur des mobilités décarbonées chez VINCI Autoroutes, membre de l'Alliance

Le premier enseignement de l'étude c'est que les constructeurs ont clairement choisi une technologie : les poids lourds électriques à batterie. Cette solution va connaitre un essor très important pour 2030, 2035. Le deuxième enseignement, c'est que ces poids-lourds ne pourront circuler que si le réseau de borne de recharge à forte puissance se développe sur les grands axes. Nous n'avons donc pas uniquement besoin de financements : la planification est très importante, au regard des longs travaux à venir pour raccorder les réseaux électriques, et préparer les infrastructures et le déficit de foncier. En d'autres mots, où peut-on installer ces bornes ? Il ne faut surtout pas être en retard sur ce déploiement de bornes.

Aménager les territoires

Giovanni Mattarolo, Chef de projet Mobilité Electrique, Enedis

Une première conclusion importante de l'étude est que l’électrification de la mobilité lourde longue distance n’est pas seulement un sujet d’adaptation des réseaux électriques. C’est également un sujet d’aménagement du territoire, avec un besoin d’infrastructures conséquent (création de parkings, choix et installations de bornes…), qui nécessite une planification concertée avec l'ensemble des acteurs.

Publié le 16 avril 2024